25 mars 2010

J'accepte

Le texte que je reproduis ici a été lu à la radio le 11 Septembre 2003 par un anonyme.




(Le système mis en place dans notre monde libre repose sur l'accord tacite d'une sorte de contrat passé avec chacun d'entre nous dont voici, dans les grandes lignes, le contenu)

Voici le contrat reconductible par tacite reconduction que vous signez chaque matin en vous réveillant simplement et ne faisant rien

Mes chers amis,

Le 11 septembre marque le triste anniversaire d'une catastrophe hautement symbolique pour l'humanité.
Peu importe nos croyances ou nos idées politiques, le système mis en place dans notre monde libre repose sur l'accord tacite d'une sorte de contrat passé avec chacun d'entre nous, dont voici dans les grandes lignes le contenu :

1) J'accepte la compétition comme base de notre système, même si j'ai conscience que ce fonctionnement engendre frustration et colère pour l'immense majorité des perdants,

2) J'accepte d'être humilié ou exploité a condition qu'on me permette a mon tour d'humilier ou d'exploiter quelqu'un occupant une place inférieure dans la pyramide sociale,

3) J'accepte l'exclusion sociale des marginaux, des inadaptés et des faibles car je considère que le prise en charge de la société a ses limites,

4) J'accepte de rémunérer les banques pour qu'elles investissent mes salaires à leur convenance, et qu'elles ne me reversent aucun dividende de leurs gigantesques profits (qui serviront a dévaliser les pays pauvres, ce que j'accepte implicitement). J'accepte aussi qu'elle prélèvent une forte commission pour me prêter de l'argent qui n'est autre que celui des autres clients,

5) J'accepte que l'on congèle et que l'on jette des tonnes de nourriture pour ne pas que les cours s'écroulent, plutôt que de les offrir aux nécessiteux et de permettre à quelques centaines de milliers de personnes de ne pas mourir de faim chaque année,

6) J'accepte qu'il soit interdit de mettre fin à ses jours rapidement, en revanche je tolère qu'on le fasse lentement en inhalant ou ingérant des substances toxiques autorisées par les états,

7) J'accepte que l'on fasse la guerre pour faire régner la paix. J'accepte qu'au nom de la paix, la première dépense des états soit le budget de la défense. J'accepte donc que des conflits soient créés artificiellement pour écouler les stocks d'armes et faire tourner l'économie mondiale,

8) J'accepte l'hégémonie du pétrole dans notre économie, bien qu'il s'agisse d'une énergie coûteuse et polluante, et je suis d'accord pour empêcher toute tentative de substitution, s'il s'avérait que l'on découvre un moyen gratuit et illimité de produire de l'énergie, ce qui serait notre perte,

9) J'accepte que l'on condamne le meurtre de son prochain, sauf si les états décrètent qu'il s'agit d'un ennemi et nous encouragent à le tuer,

10) J'accepte que l'on divise l'opinion publique en créant des partis de droite et de gauche qui passeront leur temps à se combattre en me donnant l'impression de faire avancer le système. j'accepte d'ailleurs toutes sortes de divisions possibles, pourvu qu'elles me permettent de focaliser ma colère vers les ennemis désignés dont on agitera le portrait devant mes yeux,

11) J'accepte que le pouvoir de façonner l'opinion publique, jadis détenu par les religions, soit aujourd'hui aux mains d'affairistes non élus démocratiquement et totalement libres de contrôler les états, car je suis convaincu du bon usage qu'ils en feront,

12) J'accepte l'idée que le bonheur se résume au confort, l'amour au sexe, et la liberté à l'assouvissement de tous les désirs, car c'est ce que la publicité me rabâche toute la journée. Plus je serai malheureux et plus je consommerai : je remplirai mon rôle en contribuant au bon fonctionnement de notre économie,

13) J'accepte que la valeur d'une personne se mesure à la taille de son compte bancaire, qu'on apprécie son utilité en fonction de sa productivité plutôt que de sa qualité, et qu'on l'exclue du système si elle n'est plus assez productive,

14) J'accepte que l'on paie grassement les joueurs de football ou des acteurs, et beaucoup moins les professeurs et les médecins chargés de l'éducation et de la santé des générations futures,

15) J'accepte que l'on mette au banc de la société les personnes âgées dont l'expérience pourrait nous être utile, car étant la civilisation la plus évoluée de la planète (et sans doute de l'univers) nous savons que l'expérience ne se partage ni ne se transmet,

16) J'accepte que l'on me présente des nouvelles négatives et terrifiantes du monde tous les jours, pour que je puisse apprécier a quel point notre situation est normale et combien j'ai de la chance de vivre en occident. je sais qu'entretenir la peur dans nos esprits ne peut être que bénéfique pour nous,

17) J'accepte que les industriels, militaires et politiciens se réunissent régulièrement pour prendre sans nous concerter des décisions qui engagent l'avenir de la vie et de la planète,

18) J'accepte de consommer de la viande bovine traitée aux hormones sans qu'on me le signale explicitement. J'accepte que la culture des OGM se répande dans le monde entier, permettant ainsi aux trusts de l'agroalimentaire de breveter le vivant, d'engranger des dividendes conséquents et de tenir sous leur joug l'agriculture mondiale,

19) J'accepte que les banques internationales prêtent de l'argent aux pays souhaitant s'armer et se battre, et de choisir ainsi ceux qui feront la guerre et ceux qui ne la feront pas. Je suis conscient qu'il vaut mieux financer les deux bords afin d'être sûr de gagner de l'argent, et faire durer les conflits le plus longtemps possible afin de pouvoir totalement piller leurs ressources s'ils ne peuvent pas rembourser les emprunts,

20) J'accepte que les multinationales s'abstiennent d'appliquer les progrès sociaux de l'occident dans les pays défavorisés. Considérant que c'est déjà une embellie de les faire travailler, je préfère qu'on utilise les lois en vigueur dans ces pays permettant de faire travailler des enfants dans des conditions inhumaines et précaires. Au nom des droits de l'homme et du citoyen, nous n'avons pas le droit de faire de l'ingérence,

21) J'accepte que les hommes politiques puissent être d'une honneteté douteuse et parfois même corrompus. je pense d'ailleurs que c'est normal au vu des fortes pressions qu'ils subissent. Pour la majorité par contre, la tolérance zéro doit être de mise,

22) J'accepte que les laboratoires pharmaceutiques et les industriels de l'agroalimentaire vendent dans les pays défavorisés des produits périmés ou utilisent des substances cancérigènes interdites en occident,

23) J'accepte que le reste de la planète, c'est-à-dire quatre milliards d'individus, puisse penser différemment à condition qu'il ne vienne pas exprimer ses croyances chez nous, et encore moins de tenter d'expliquer notre Histoire avec ses notions philosophiques primitives,

24) J'accepte l'idée qu'il n'existe que deux possibilités dans la nature, à savoir chasser ou être chassé. Et si nous sommes doués d'une conscience et d'un langage, ce n'est certainement pas pour échapper à cette dualité, mais pour justifier pourquoi nous agissons de la sorte,

25) J'accepte de considérer notre passé comme une suite ininterrompue de conflits, de conspirations politiques et de volontés hégémoniques, mais je sais qu'aujourd'hui tout ceci n'existe plus car nous sommes au summum de notre évolution, et que les seules règles régissant notre monde sont la recherche du bonheur et de la liberté de tous les peuples, comme nous l'entendons sans cesse dans nos discours politiques,

26) J'accepte sans discuter et je considère comme vérités toutes les théories proposées pour l'explication du mystère de nos origines. Et j'accepte que la nature ait pu mettre des millions d'années pour créer un être humain dont le seul passe-temps soit la destruction de sa propre espèce en quelques instants,

27) J'accepte la recherche du profit comme but suprême de l'Humanité, et l'accumulation des richesses comme l'accomplissement de la vie humaine,

28) J'accepte la destruction des forêts, la quasi-disparition des poissons de rivières et de nos océans. J'accepte l'augmentation de la pollution industrielle et la dispersion de poisons chimiques et d'éléments radioactifs dans la nature. J'accepte l'utilisation de toutes sortes d'additifs chimiques dans mon alimentation, car je suis convaincu que si on les y met, c'est qu'ils sont utiles et sans danger,

29) J'accepte la guerre économique sévissant sur la planète, même si je sens qu'elle nous mène vers une catastrophe sans précédent,

30) j'accepte cette situation, et j'admets que je ne peux rien faire pour la changer ou l'améliorer,

31) J'accepte d'être traité comme du bétail, car tout compte fait, je pense que je ne vaux pas mieux,

32) J'accepte de ne poser aucune question, de fermer les yeux sur tout ceci, et de ne formuler aucune véritable opposition car je suis bien trop occupé par ma vie et mes soucis. J'accepte même de défendre à la mort ce contrat si vous me le demandez,

33) J'accepte donc, en mon âme et conscience et définitivement, cette triste matrice que vous placez devant mes yeux pour m'empêcher de voir la réalité des choses. Je sais que vous agissez pour mon bien et pour celui de tous, et je vous en remercie.

Homo Sapiens Universalis

Jusqu'à présent, nous nous définissions comme des HOMO SAPIENS SAPIENS, car chacun d'entre nous avait la conscience de sa propre existence (sous-entendu parmi les siens, sa famille, sa tribu, voire même sa nation).

Il me semble que l'humanité est en train de passer à un nouveau stade, celui de l'HOMO SAPIENS UNIVERSALIS. De la conscience du « Je », nous sommes parvenus à la conscience du « Nous », au sens large : Nous les Êtres Humains, et même Nous les Êtres Vivants (sur Terre, et jusque dans l'Univers).

Ce qui, hier encore, n'était réservé qu'à quelques êtres d'exception, est aujourd'hui à la portée de tous, car nous sommes entrés dans l'Apocalypse, l'ère du Verseau, c'est-à-dire l'ère des révélations.




Aymeric Chauprade, la Russie et l'OTAN

Aymeric Chauprade
Je vous avais présenté Aymeric Chauprade dans un précédent message, à propos de son livre sur le Choc des Civilisations, qui traite notamment du 11 Septembre.

Voici une interview de ce Monsieur, après ses entretiens avec la Douma, au cours desquels ils ont notamment parlé de la relation entre la Russie et l'Europe.

La fin de cette vidéo fait écho à mon court article sur le retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN.



23 mars 2010

Dispute sur le Sel et le Fer (3)



LE TRAVAIL
ET LE SAVOIR-FAIRE


La fortune des villes.
LE GRAND SECRÉTAIRE. - Si les villes de Zhuo dans la principauté de Yan, Handan à Zhao, Wen à Wei, Ying à Han et Linzi à Ts'i, les cités de Wan et les deux Tchao à Sanchuan sont les plus opulentes et les plus renommées des capitales provinciales de l'Empire, ce n'est pas que leurs alentours soient particulièrement bien mis en valeur, mais c'est qu'elles sont situées à la croisée des chemins, et commandent les routes qui relient les grandes métropoles. La population s'accroît là où abondent les richesses, les familles prospèrent là où se trouvent les marchés. La richesse ne dépend pas du travail, mais du savoir-faire. La fortune d'une ville tient plus à sa position géographique qu'à son ardeur aux travaux agricoles.

L'épargne et le travail.
LES LETTRÉS. - Tchao et Tchongshan, situées au cœur du bassin du fleuve Jaune, sont au centre du réseau routier et commandent tous les axes de communication de l'Empire. Les marchands s'y croisent dans les avenues et les princes feudataires s'y rencontrent dans les venelles. Mais les habitants ne s'intéressent qu'aux futilités. Ils sont fastueux et n'ont cure des activités essentielles, si bien que les champs sont à l'abandon. Les hommes et les femmes sont frivoles et coquets ; ils n'ont même pas un panier de grains de réserve, mais n'en continuent pas moins à s'égosiller et à gratter de la guitare dans leur logis. C'est pourquoi il y a tant de pauvres et si peu de riches à Tch'ou et à Tchao. Par contre, dans les pays de Song, Wei, Han et Liang, où l'on sait l'importance des activités fondamentales et où l'on s'adonne à l'agriculture, il n'est pas, même dans le menu peuple, de famille qui ne soit prospère ni d'homme qui n'ait le nécessaire.

L’économie, et non la situation géographique, procure le bien-être. L’épargne et le travail sont dispensateurs de richesses, et non des officiers ou des instructeurs chargés de surveiller les paysans.

L'univers fait circuler les biens.
LE GRAND SECRÉTAIRE. - D'après la théorie des Cinq Éléments, le bois est l'élément de l'est, mais on trouve des monts riches en cuivre à Dan Zhang. Au sud correspond le feu, mais dans le pays des Vietnamiens coulent des rivières larges comme des océans. A l'ouest correspond le métal, toutefois c'est dans les provinces de Shu et de Long que poussent les forêts qui fournissent le bois de construction le plus réputé. Au nord correspond l'eau, et pourtant à Youdu s'étendent des déserts de sable. C'est ainsi que l'univers lui-même corrige les excès dans l'un et l'autre sens en répartissant et en faisant circuler les biens.

De nos jours, les bambous sont si touffus clans les régions de Wu et de Yue et les forêts si vastes à Sui et à Tang que leur exploitation dépasse largement les besoins locaux. Par contre, à Cao, à Wei, à Liang et à Song, on en est réduit à laisser les morts sans cercueils. Les poissons du fleuve Bleu et des grands lacs, les poissons-globes des régions de Lai et de Huang sont si nombreux qu'ils excèdent de loin la consommation de ces provinces, tandis qu'à Zou, à Lou, à Zhou et à Han, on ne mange que des légumes. Si le peuple est démuni quand les ressources de l'univers sont inépuisables et quand les monts et les mers recèlent d'immenses trésors, c'est la mauvaise répartition des richesses et leur circulation défectueuse qu'il faut incriminer.

Le tournis des produits exotiques.
LES LETTRÉS. - Jadis, les poutres des habitations étaient mal équarries, les toits étaient de chaume non taillé. On portait des habits de toile grossière et on mangeait dans des écuelles de terre. On fondait le métal pour forger des houes et on pétrissait la terre pour modeler des récipients. Les artisans ne s'essayaient pas à fabriquer des objets artistiques ou ingénieux. On n'appréciait pas les choses qui ne servaient à rien. Chacun se contentait de son chez-soi et des mœurs les plus simples. On trouvait succulente sa nourriture et commodes ses ustensiles. On n'éprouvait nul besoin d'échanger des produits exotiques ni d'acheter des jades de Kunshan.

De nos jours, les mœurs se sont déréglées, nos contemporains rivalisent de luxe et de dissipation. Les femmes tissent des toiles arachnéennes et les artisans sont d'une habileté diabolique. On n'apprécie plus que ce qui est délicat et contourné, on a la rage de sculpter les matériaux bruts ; on éventre les montagnes pour extraire des métaux précieux ; on plonge dans des gouffres sans fond pour dérober les perles ; on creuse des fosses pour prendre aux rhinocéros leurs cornes, aux éléphants leur ivoire ; on tend des filets pour arracher leurs plumes aux martins-pêcheurs. Les produits achetés aux sauvages étourdissent la Chine. Les richesses de Gong et de Zuo sont acheminées jusqu'à la côte est et on échange des marchandises à des milliers de kilomètres. Bref, on perd son temps et sa peine en de vains trafics. Aussi les hommes et les femmes du peuple n'ont-ils plus le cœur à l'ouvrage et les biens de première nécessité, nourriture et vêtements, viennent-ils à manquer. Un monarque avisé interdit les bénéfices excessifs, il restreint les dépenses somptuaires, de sorte que ses sujets retournent aux activités productives. Alors, les vivants ont de quoi vivre et les morts peuvent reposer dans des cercueils.

Nécessité du profit.
LE GRAND SECRÉTAIRE. - Jadis, il y avait une stricte réglementation de la taille des palais et de la somptuosité des parures et des équipages. Mais les textes sont muets sur les toits de chaume ou la décoration des poutres. Certes, le sage évite le luxe excessif, mais il stigmatise la parcimonie car elle conduit à l'étroitesse d'esprit. Jadis, Sun-shu Ao exerçait la charge de Premier ministre de Tch'ou. Sa femme ne portait pas de vêtements de soie et ses chevaux ne mangeaient pas d'avoine. Confucius exprima sa réprobation en ces termes : « Sa conduite n'est pas correcte, tant de parcimonie fait peser une trop lourde contrainte sur les inférieurs. » Le poème du Criquet dénonce les mêmes erreurs. Le Kouan-tseu a dit : « Que faire du bois de construction si les palais ne sont pas ouvragés ? Quadrupèdes et oiseaux pulluleront si les cuisines ne regorgent pas de nourriture. » L'agriculture n'a plus de raison d'être sans la recherche du profit ; et sans robes d'apparat richement brodées, les tisserandes se trouveraient au chômage. Les artisans, négociants, charpentiers et ingénieurs répondent aux besoins de l'État et pourvoient la nation en ustensiles et machines qui lui sont nécessaires. Ils existent depuis toujours et continueront à exister. Confucius dit : « Les artisans demeurent au marché afin de bien faire leur métier. » Marchands et paysans échangent mutuellement leurs produits pour le plus grand bénéfice de l'agriculture et de l'artisanat. Ainsi, les marchandises circulent entre les habitants des montagnes, des marais, des jungles et des déserts afin que les biens soient répartis équitablement. Ceux qui possèdent en abondance un produit ne sont plus les seuls à en bénéficier et ceux qui en manquent n'en pâtissent plus. Si chacun vivait en autarcie, replié sur lui-même, on ne vendrait ni oranges ni mandarines, on n'exploiterait pas le sel de Juyan, on ne verrait sur les marchés ni bannières de laine ni tapis de feutre et les richesses forestières de Wu et de Tang seraient perdues.

Des logements plutôt que des tapis.
LES LETTRÉS. - Mencius a dit: « Si les travaux des champs sont accomplis à leur heure, on récoltera plus de grain qu'on n'en peut consommer ; si le chanvre est cultivé et le ver à soie élevé conformément aux saisons, on tissera plus de toile qu'il n'en faut pour se vêtir ; que sur les montagnes et dans les vallées la hache ne touche pas aux arbres en dehors des époques prescrites, on aura plus de bois qu'on n'en pourra employer ; qu'il soit interdit de chasser et de pêcher en dehors de la période convenable, on aura plus de gibier et de poissons qu'on n'en peut manger. »

Certes, quand on décore maisons et palais avec un luxe effréné, quand on élève des pavillons à étage et des belvédères, quand les charpentiers équarrissent des troncs d'arbres pour qu'on en tire des objets minuscules, sculptant là des nuages, ici des montagnes, il n'est pas surprenant que le bois manque ! On quitte la terre pour s'adonner à des arts futiles. On ne fabrique plus que des objets baroques et chantournés. On grave, on incruste, on reproduit des figures animales ; il semble que l'on se soit fixé pour tâche d'épuiser toutes les formes possibles de la création. Et on s'étonne que le blé manque ! Quand les femmes déploient des prodiges d'habileté pour broder des étoffes d'une infinie délicatesse, il est naturel que la soie vienne à faire défaut. Quand les cuisiniers font fricasser des femelles encore pleines et se livrent à des préparations savantes, combinant toutes les saveurs possibles, il est naturel que la viande et le poisson deviennent rares. Nous ne devons pas déplorer à notre époque, que le nombre des animaux ne cesse de croître ou que les forêts soient sous-exploitées, mais plutôt que l'extravagance et la dissipation ne connaissent plus de frein. Ce n'est pas tant la pénurie d'oranges ou de tapis qui est à craindre, mais plutôt le manque de nourriture et de logements décents.

20 mars 2010

Discours de Robespierre

Marre de la Dispute Chinoise vieille de 2000 ans ? Allez, on fait un p'tit saut dans l'temps (et dans l'espace), et nous voici à la fin XVIIIème siècle, auprès de Robespierre.

Cette vidéo, préparée par Le Mouvement Abstentionniste et Progressiste, retranscrit un discours du célèbre révolutionnaire, lu sur une musique Dub du meilleur effet.

"Les Hommes sont-ils égaux en droit ? Si vous n'avez pas tout fait pour la Liberté, alors vous n'avez rien fait !"





"[...] Et quelle aristocratie ? La plus insupportable de toutes : celle des riches..."

"Quelle est la source de ces extrêmes inégalités des fortunes qui rassemblent toutes les richesses en un petit nombre de mains ? Ne sont-ce pas de mauvaises lois ? Des mauvais gouvernements ?"

"Le peuple a changé de chaînes, et non de destinée"

A propos de la conspiration :
"Et... A qui faut-il imputer ces maux ? A nous même !!"



Quelle lucidité dans ses propos ! Ils résonnent jusqu'à notre époque ; ils justifient à eux seuls une nouvelle Révolution.


16 mars 2010

Dispute sur le Sel et le Fer (2)




LES BIENS DE LA TERRE
ET LES MIRAGES DU PROFIT


Le souverain prévoit la pénurie.
LE GRAND SECRÉTAIRE. - Un sage monarque a la haute main sur toutes les ressources naturelles de son pays, il tient fermement la balance du commerce et veille à ce que chaque chose soit faite en son temps. Il contrôle son peuple en gérant l'économie. Dans les années de bonnes récoltes, il stocke en prévision des disettes. Dans les années de vaches maigres, libérant marchandises et monnaies, il écoule les surplus afin de lutter contre la pénurie. Quand l’empereur Yu affronta les inondations et l'empereur Tang la sécheresse, leurs sujets, réduits à la dernière extrémité, s'entraidaient pour ne pas périr de froid et de faim. Alors Yu et Tang fondirent de la monnaie, l'un avec le métal du mont Li, l'autre avec le cuivre du mont Zhuang et secoururent la multitude. L’Empire loua leur bonté.

Naguère, la crise financière empêcha de payer leur solde à nos troupes, tandis que, des inondations ayant ravagé les régions orientales, les provinces de Ts'i et de Tchao connurent une terrible famine. Mais les réserves accumulées dans les magasins impériaux par le système de régulation des prix permirent à la fois de payer les soldats et de venir en aide aux habitants des zones sinistrées. Les biens collectés par le système de régulation des prix et les richesses amassées dans les magasins d'État ne doivent pas entrer dans le circuit commercial ni répondre à des dépenses strictement militaires ; ils permettent, tout au contraire, d'aider ceux qui sont dans le besoin et de lutter contre les calamités naturelles.

L’agriculture, seule priorité.
LES LETTRÉS. - La vérité, c'est que sous le règne des sages souverains le peuple s'adonnait corps et âme aux travaux agricoles sans rechigner à l'ouvrage. En trois ans de labours, les excédents égalaient la récolte d'une année ; au bout de neuf ans, celle de trois. C'est ainsi que les souverains Yu et Tang se prémunirent contre l'inondation et la sécheresse et assurèrent la sécurité de leurs sujets.

Vous aurez beau monopoliser toutes les ressources du globe et inventer cent manières de tirer du profit : faute de défricher les terres incultes et de cultiver correctement les champs, on ne pourra jamais assurer la subsistance du peuple. C'est pourquoi, dans l'Antiquité, on mettait toute son ardeur dans les activités fondamentales, et les plantations prospéraient. Les paysans, courbés sur leur charrue, avaient nourriture et vêtements en suffisance si bien qu'on pouvait supporter sans trop de dommage plusieurs mauvaises récoltes consécutives. Quand labour et semailles, tâches essentielles, ainsi que vêtement et nourriture, biens de première nécessité, sont assurés ensemble, alors le pays est prospère et son peuple heureux. Ou, comme le dit le Livre des odes : « Les cent maisons seront pleines, femmes et enfants seront dans la joie. »

Autres moyens de l'abondance.
LE GRAND SECRÉTAIRE. - On ne dirige pas une famille selon un seul principe, on n'enrichit pas un pays par un seul moyen. Si l'agriculture seule permettait aux hommes de subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles, l'empereur Chouen n'aurait pas été potier ni le ministre Yi Yin (Ministre exemplaire de l'empereur Tang maître queux. Celui qui est expert dans l'art de gouverner ne lâche pas l'essentiel pour l'accessoire ni la réalité pour l'illusion.

Les richesses naturelles de notre pays, les trésors obtenus par le système de la régulation des prix servent à contrôler l'économie et à tenir les princes feudataires sous notre coupe. L'or des rivières Ru et Han, les tissages et les soieries sont des trésors qui appâtent les pays étrangers et nous rendent maîtres de nos voisins, les Huns et les Tibétains. Nous grignotons les richesses de nos ennemis en échangeant avec eux une pièce de soie chinoise contre des marchandises qui valent des monceaux d'or. Mules, ânes et chameaux franchissent les passes en longues caravanes, alezans et chevaux pommelés viennent remplir nos haras ; marmottes, zibelines, renards, blaireaux, couvertures bariolées et tapis chamarrés s'entassent dans les magasins impériaux ; jades précieux, coraux, cristaux font maintenant partie de nos trésors. Les richesses des pays étrangers affluent chez nous, l'importation des marchandises étrangères nous procure l'abondance, et le peuple ne manque de rien puisque les bénéfices ne s'enfuient pas à l'étranger. Pour parler comme le Livre des odes : « Les cent maisons sont pleines, femmes et enfants sont dans la joie. »

Coûteuses babioles.
LES LETTRÉS. - Jadis, les marchands faisaient circuler les marchandises sans arrière-pensées et les artisans fixaient leurs prix sans chercher à tromper personne. Le gentilhomme pouvait se livrer de la même façon aux travaux des champs ou à la chasse et à la pêche.

Mais le commerce développe la duperie et l'artisanat, l'artifice. Ainsi naissent des ambitions démesurées et disparaît la vergogne. Les hommes peu scrupuleux deviennent franchement malhonnêtes et les hommes intègres peu scrupuleux. Le sage Yi Yin se réfugia à Hao quand le tyran Kie commença à remplir son palais de femmes et de musiciennes parées comme des châsses. Femmes et musiciennes conduisirent le tyran Kie à sa perte. Tout compte fait, les mules et les ânes sont moins utiles que les bœufs et les chevaux ; les zibelines, les étendards et les tapis moins précieux que la soie. Le corail et le jade sont extraits du mont Kun ; les perles, les cornes de rhinocéros, l'ivoire viennent de Guilin. Ces contrées sont à des milliers de milles de chez nous. Si on calcule le coût nécessaire pour produire de la soie ou des céréales et qu'on le compare avec les dépenses en matériel et en capital pour ces marchandises venues de l'étranger, une seule de ces babioles revient cent fois plus cher, et on paie plusieurs milliers de boisseaux de grain pour une poignée de ces produits.

Quand les grands aiment les curiosités, le goût pour les vêtements extravagants et dispendieux se propage dans le peuple. On s'entiche d'objets exotiques, et les richesses nationales vont remplir les coffres des pays étrangers. Un prince n'attache pas de valeur au luxe inutile, et son peuple est économe ; il n'aime pas les objets exotiques ou étrangers, et son pays est prospère. La seule méthode de gouvernement consiste à user de ses biens avec parcimonie, à développer les activités fondamentales et à répartir les terres suivant le vieux système du champ communal.

Tirer parti d'autrui.
LE GRAND SECRÉTAIRE. - Si vous quittez la capitale pour voyager par monts et par vaux dans toutes les directions, à travers les commanderies et les principautés, vous ne trouverez pas une seule grande et belle ville qui ne soit percée de part en part de larges avenues, qui ne grouille de marchands et de négociants et qui ne regorge de toutes sortes de produits. Les sages savent mettre à profit les saisons, et les hommes habiles exploiter les richesses naturelles. L’homme supérieur sait tirer parti d'autrui ; l'homme médiocre ne sait se servir que de lui-même. Les marchands de Yuan, de Zhou, de Ts'i, de Lou qui circulent dans tout l'Empire ont réussi à amasser des dizaines de milliers d'écus en trafiquant. Comment l'agriculture suffirait-elle à enrichir le pays, et pourquoi le système du champ communal aurait-il, à lui seul, le privilège de procurer au peuple ce dont il a besoin ?

La spéculation et le chaos.
LES LETTRÉS. - Quand « les eaux débordées montèrent à l'assaut du ciel », Yu le Grand exécuta d'immenses travaux. Quand le fleuve Jaune sortit de son lit, la construction de la digue de Hsuanfang évita le désastre. Dans un monde en proie au chaos, on ne pense plus qu'à bâtir des fortunes par la spéculation. Sous le gouvernement parfait de la haute Antiquité, le peuple était simple, il s'adonnait à l'agriculture et vivait heureux avec des désirs modestes. En ces temps-là, les passants étaient rares sur les chemins et l'herbe croissait sur les places des marchés. Celui qui ne labourait pas ne pouvait pas remplir son estomac, celui qui ne tissait pas avec courage n'avait rien à se mettre sur le dos. Et malgré les désirs de la multitude, l'art des commerçants ou des artisans de Tao ou de Yuan ne pouvait s'exercer. De mémoire d'homme, on n'a jamais reçu sans avoir donné ni jamais connu le succès sans avoir payé de sa personne.

11 mars 2010

Dispute sur le Sel et le Fer (1)

L'ETAT,
SOURCE DU GOUVERNEMENT
OU DE LA DEPRAVATION

Le fond du débat.
LES LETTRÉS. - Nul ne peut ignorer que si l'on veut gouverner les hommes et susciter les vertus civiques, il importe avant tout de réprimer l'esprit de lucre pour exalter le sens moral. Qu'il n'est pas d'autre moyen de mettre un frein à la licence et de transformer les mentalités. Aujourd'hui, par le monopole du sel et du fer, par la régie des alcools et par le système de régulation des prix, l'État s'ingénie à faire des bénéfices comme un simple particulier, ruinant du même coup la rusticité antique et encourageant la cupidité générale. Comme conséquence, on voit diminuer le nombre de ceux qui s'adonnent aux activités fondamentales et proliférer les activités secondaires. Or l'accessoire nuit au principal : la dépravation est proportionnelle à l'importance des secteurs parasitaires. Les biens abondent quand le peuple travaille : qu'il se relâche et le pays souffre du froid et de la faim. Nous désirons que soit mis un terme au monopole du fer et du sel, à la régie d'État sur les alcools et au système de régulation des prix. L'intérêt de la nation exige que soient développées les activités de première nécessité au détriment des autres, c'est-à-dire que l'on s'attache à accroître les revenus de l'agriculture, seule activité fondamentale.

Le monopole soutient la Grande Muraille.
LE GRAND SECRETAIRE. - Chacun sait que les Huns se sont révoltés et refusent de faire leur soumission. Qu'ils pillent sans relâche les régions frontalières. Qu'on ne pourra mettre fin à leurs exactions qu'en demandant un effort supplémentaire à nos soldats et non en restant les bras croisés. Feu l'empereur, compatissant aux malheurs endurés par ses sujets des confins de l'Empire souvent captifs des hordes barbares, fortifia les points stratégiques, construisit des tours de guet, établit des cantonnements militaires. Mais, comme le Trésor ne pouvait subvenir aux dépenses, force fut de décréter le monopole du sel et du fer et la régie des alcools et d'établir le système de régulation des prix. Ces mesures, qui seules ont permis, en multipliant les rentrées, de faire face aux dépenses exigées par la défense des frontières, aujourd'hui les lettrés veulent les abolir. Ce qui reviendrait à vider les coffres de l'État et à priver de toute défense les régions menacées. On voit mal comment on pourrait, dans ces conditions, empêcher nos soldats qui montent la garde sur la Grande Muraille de mourir de froid et de faim. Supprimer les monopoles d'État porterait un coup fatal à la nation.

Le vrai conquérant n'a pas besoin de guerroyer.
LES LETTRÉS. - Confucius a dit : « La sous-population et la pauvreté sont moins funestes que l'inégalité ou l'agitation sociale. » C'est pourquoi un dirigeant, qu'il soit empereur, feudataire ou grand officier ne recherche ni la richesse ni le profit : pour éduquer le peuple et se l'attacher, il cultive le sens civique et la vertu. Les habitants des régions proches lui sont dévoués corps et âme et ceux des régions lointaines se soumettent dans l'allégresse. Car le vrai conquérant n'a pas besoin de faire la guerre ; le grand général n'a pas besoin de mettre ses troupes en campagne ni l'habile stratège de livrer bataille. Le souverain qui règne par la bonté n'a pas d'ennemi sous le ciel. Qu'est-il besoin de dépenses militaires ?

Nécessité de châtier les Huns.
LE GRAND SECRETAIRE. - Les Huns pervers et impudents se sont permis de franchir nos frontières et portent la guerre jusqu'au cœur du pays, massacrant la population et nos officiers des marches, ne respectant plus aucune autorité. Voilà longtemps qu'ils méritent un châtiment exemplaire. Au spectacle de son peuple privé de paix, de ses officiers par monts et par vaux, l'empereur dans son immense bonté, se lamente. Déjà, nos soldats ont revêtu leur cuirasse et saisi leur lance pour refouler l'ennemi. Dans les circonstances actuelles, il serait criminel de vouloir mettre un terme au monopole du fer et du sel et de saper notre stratégie sous prétexte que ces messieurs trouvent excessives les dépenses militaires et n'ont cure de la tragique situation des frontières.

La force aveugle des armes.
LES LETTRÉS. - Jadis, quand on estimait la persuasion en méprisant la force, Confucius disait : « Si les peuples des confins refusent de se soumettre, qu'on les attire par la vertu civilisatrice. C'est quand ils seront attirés que l'on pourra les pacifier. » Aujourd'hui, ne vous fiant qu'à la force aveugle des armes, vous avez levé des troupes, établi des colonies militaires. Cette armée, sur le pied de guerre en permanence, exige d'incessantes expéditions de fourrage et de matériel. Nos soldats sont stationnés hâves et grelottants aux marches de l'Empire tandis qu'à l'intérieur du pays le peuple se tue à la tâche. Même si le monopole du sel et du fer a représenté, dans un premier temps, une mesure utile, à long terme il ne peut être que néfaste. Voilà pourquoi nous réclamons sa suppression.

Les échanges, clefs de l'économie.
LE GRAND SECRETAIRE. - Jadis, les fondateurs de principautés encourageaient à la fois l'agriculture et l'industrie, tout en favorisant la circulation des marchandises. Les marchés, en permettant de satisfaire en un même lieu toutes les demandes, attiraient les hommes et les produits. S'étant procuré ce dont ils avaient besoin, paysans, marchands et artisans se séparaient après leurs échanges. Le Livre des mutations dit : « En généralisant les transformations, ils ont facilité la vie du peuple. » Sans artisans qui les fabriquent, il n'y aurait pas d'outils pour l'agriculture et ce serait la baisse de la production céréalière ; sans marchands qui les distribuent, les objets de luxe disparaîtraient et ce serait l'appauvrissement du trésor. Les monopoles du sel et du fer, la régie des alcools ainsi que le système de régulation des prix n'ont d'autre but que de régler les échanges et le trafic commercial. Les abolir serait une catastrophe pour l'économie.

Le profit, corrupteur du peuple.
LES LETTRÉS. - Guidé par la vertu, le peuple reste honnête ; stimulé par l'appât du gain, il se corrompt. Lao-tseu (Sage et philosophe contemporain de Confucius (Ve siècle avant Jésus-Christ), auteur du Livre de la voie et de la vertu -Tao-te King-, père du taoïsme) a dit : « Un pays n'est jamais aussi pauvre que lorsqu'il paraît déborder de richesses. » Non que celles-ci soient trop abondantes, mais parce que la multitude des convoitises affole le peuple. Un roi sage donne le pas à l'agriculture sur toute autre activité. Par les rites et l'équité, il modère les désirs du peuple et s'applique à faire produire en abondance les haricots et les châtaignes. L’activité des marchands et des artisans n'est pas du ressort d'un gouvernement digne de ce nom.

Les échanges, bien-être du peuple.
LE GRAND SECRETAIRE. - Le Kouan-tseu a dit : « Si dans un État qui possède des plaines fertiles, le peuple ne mange pas à sa faim, c'est que la production des outils est insuffisante. Si dans un pays aux ressources naturelles importantes, le peuple manque de richesse, c'est que le commerce et l'artisanat sont mal organisés. » Le cinabre, la laque et les étendards du Sseu-tch'ouan, les peaux et les ivoires de la région du moyen Yang-tseu, les bois de construction et les flèches de bambou de Kiang-nan, les poissons, le sel, les pelisses et les feutres de Yan et de Ts'i, la laque, la soie, la toile de Yan et de Yi zhou sont des produits indispensables au bien-être des citoyens. Il faut des artisans pour les travailler, des marchands pour les faire circuler. Les sages de jadis ont inventé les bateaux et les rames pour traverser les rivières ; ils ont domestiqué le bœuf et le cheval pour voyager sur la terre ferme, afin qu'on puisse se rendre dans les régions les plus reculées et échanger les produits pour le plus grand bien de l'humanité. L'empereur précédent avait créé des mines et des fonderies d'État pour répondre aux exigences de l'agriculture, il avait institué un bureau de régulation des prix pour subvenir aux besoins du peuple. Toutes ces mesures ont été favorablement accueillies par l'ensemble de la population qui en tire le plus grand profit. Les supprimer causerait de graves préjudices à l'État.

À seigneur cupide, peuple voleur.
LES LETTRÉS. - Si le peuple d'un pays prospère ne mange pas à sa faim, c'est que le commerce et l'artisanat sont florissants tandis que la production de base est négligée. Si un pays possède d'importantes ressources naturelles et que son peuple manque de richesse, c'est qu'on délaisse les produits d'usage courant pour se gaver de biens superflus. Même un fleuve ne saurait remplir une coupe percée, même une montagne ne pourrait arrêter un torrent. Si l'empereur Chouen a enfoui son or, si l'empereur Kao a interdit aux marchands d'occuper une charge de fonctionnaire, c'était afin de prohiber l'esprit de lucre et de préserver l'antique simplicité des mœurs. On dit bien : « Quand les seigneurs convoitent la richesse, leurs grands officiers sont âpres, quand les grands officiers sont âpres, les simples gentilshommes sont cupides, quand les gentilshommes sont cupides, le menu peuple est voleur. » Ouvrir les vannes du profit, c'est inciter le peuple au crime !

La régulation par les transports.
LE GRAND SECRETAIRE. - Dans les temps anciens, tous les seigneurs envoyaient en tribut les produits de leur pays. Mais par suite de la complication des transports, de grandes quantités de marchandises, détériorées, ne valaient plus le prix qu'on les payait. C'est pourquoi on créa un office des transports chargé de l'acheminement des marchandises dans chaque province, facilitant ainsi la circulation des tributs venus des contrées lointaines. C'est ce que l'on appela l'Office de régulation des prix par les transports. On créa aussi, à la capitale, une commission spéciale pour s'occuper du trafic des marchandises. Cet organisme achetait quand les prix baissaient et revendait à la hausse, cela afin d'empêcher l'État de perdre de l'argent et les marchands de spéculer. C'est ce qu'on appela l'Office régulateur. L’Office régulateur assure le plein-emploi, le système de régulation des prix permet de répartir équitablement le travail. Ces deux institutions sont bénéfiques. Je ne vois pas en quoi elles « ouvrent les vannes du profit et incitent le peuple au crime ».

Un Office de trafiquants.
LES LETTRÉS. - Jadis, on établissait l'impôt sur la production propre à chacun. Les paysans payaient en grains et les femmes en tissus. À présent, on réclame aux gens ce qu'ils ne possèdent pas. De sorte que le peuple est obligé de vendre à vil prix ses produits pour satisfaire aux exigences de l'Etat. Dans certaines commanderies, où l'on demande aux paysans de tisser de la toile et de la soie, les petits fonctionnaires leur font toutes sortes de tracasseries pour acheter leurs produits. Pour obtenir une juste évaluation des prix, les paysans doivent verser des pots-de-vin, si bien que le peuple est doublement taxé. Voilà ce qu'est le système de régularisation des prix par les transports. Les fonctionnaires prospèrent, les riches marchands accaparent tous les produits en attendant une crise sur le marché. Les prix grimpent vertigineusement. Avec la flambée des prix, voilà les marchands qui revendent à la hausse pour leur plus grand bénéfice et les fonctionnaires corrompus qui ferment les yeux. Serait-ce là votre Office régulateur ? Jadis, la régulation des marchandises servait à obtenir une juste répartition du travail et à faciliter l'acheminement de l'impôt. Elle ne servait assurément pas à l'enrichissement de certains par des trafics sans scrupules !

10 mars 2010

Dispute sur le Sel et le Fer (Intro)

Le texte que je reproduis ici n'est pas de moi, l'original est en chinois et a été traduis par Delphine Baudry-Weulersse, Jean Levi et Pierre Baudry.

L'introduction à ce texte que je vous propose est tiré de la préface de Georges Walter.



Un prodigieux document sur l'art de gouverner

Porté au rang des classiques chinois, le texte que nous vous présentons n'est autre que la transcription des répliques échangées en 81 avant Jésus-Christ au cours d'une espèce de Conseil des ministres. Avec cette différence qu'aux membres du gouvernement fait face un groupe d'opposants, que ces perturbateurs, venus de toute la Chine, ont été invités à dire leur façon de penser et qu'ils le feront en égaux, avec autant de précision que de pompe et sans le moindre ménagement.

C'est en vertu d'une tradition déjà bien établie que, cette année-là, le jeune empereur Tchao, successeur du plus grand souverain de la dynastie des Han, l'empereur Wou, vient de convoquer dans son palais un groupe de soixante notables comprenant des lettrés et des sages afin que, face aux ministres, ils suscitent un débat contradictoire sur les affaires de l'Empire. Le monopole du sel et du fer, décrété quarante ans plus tôt comme moyen de renflouer le trésor épuisé par la guerre contre les Huns et quelques autres barbares, sera le point de départ de la discussion ou, comme nous le dirions, la question à l'ordre du jour. L’occasion, en vérité, d'une controverse générale dont les couteaux sont aiguisés de part et d'autre.

On parle ici deux langages apparemment inconciliables. Du côté du gouvernement, celui de l'École des lois, avec des hommes pour qui les nécessités de la guerre, les besoins du trésor et les mécanismes du profit n'ont que faire des considérations morales et des maximes de sagesse antique brandies par leurs censeurs. Auprès du Premier ministre, présent mais muet, le Grand Secrétaire, Sang Hongyang, blanchi sous le harnais de l'État et fervent zélateur des théories légistes, sera leur fougueux porte-parole. De l'autre côté, où l'on tient le langage de Confucius, voici des lettrés qui doivent leurs titres à leur connaissance des rites et des livres, sanctionnée par des examens, et des sages désignés par la renommée de leur vertu. Au total, soixante confucéens de choc, intraitables sur des principes longtemps combattus mais sur le point de triompher. L'affrontement se déroule à Chan¬g'an, dans la cité impériale, au centre de la grande salle d'audience du palais de l'Ouest, dans un décor de jade, de corail et de guirlandes.
Pendant tout ce temps, assis à l'écart, un lettré attentif et muet trempe dans un encrier son pinceau et couvre de notes des lattes de bambou. Vingt ans après, le confucéen Heng Kouan rédigera le dialogue sur dix liasses de bambou et le divisera en soixante chapitres, ajoutant, à la manière du Journal officiel, de discrètes indications scéniques.

C'est miracle que la « dispute orageuse », qui a traversé près de vingt siècles, restitue, avec sa tension théâtrale et son rythme de joute rituelle, l'intonation même des acteurs et jusqu'à leurs haussements de sourcils. Mais il ne lui suffit pas d'éclairer la Chine de son temps comme celle d'aujourd'hui. Force nous est de constater que son propos est plus actuel qu'exotique, plus moderne que vénérable et, somme toute, aussi français que chinois. Que les Chinois discutaient, en 81 avant Jésus-Christ, du prix des mandarines et de la pénurie de logements ; qu'ils se demandaient si les inconvénients du progrès ne font pas payer trop cher ses avantages ; que les ministres se plaignaient de leurs frais de représentation; que nos politiciens occidentaux n'utilisent pas moins allègrement que leurs devanciers célestes les deux grands ingrédients du discours politique, à savoir le bon sens et la mauvaise foi.

Si le Yantie lun n'était qu'un exposé des théories légistes et confucéennes ou, comme on l'a dit, un affrontement entre modernistes et réformistes ou encore entre gestionnaires et idéologues, s'il ne nous parlait que de la gabelle et de la nationalisation des mines de fer, sa lecture, du moins pour le grand nombre, serait passablement rébarbative. Or ce texte, qui charrie l'amoncellement de la vie, qui en répand les couleurs et même les odeurs, ne tire pas sa fraîcheur singulière de ses fleurs de rhétorique mais de la violence de sa réalité.

Le Nouvel Ordre Mondial, par Pierre Hillard

Voici une vidéo de Pierre Hillard sur le "Nouvel Ordre Mondial".

Pour présenter ce conférencier, je dirais simplement qu'il est Docteur en science politique et professeur de relations internationales à l’École supérieure du commerce extérieur.

Prévoyez quand même deux heures pour visionner son exposé sur le Bilderberg, la construction de l'Europe, et autre gâteries concoctées par nos chères élites (et oui, nous vivons sous un despotisme "éclairé" !).

Heureusement, c'est Internet, et on peut revenir pour regarder une autre fois, en plusieurs fois, à deux ou à trois ;-)



La vidéo met quelques secondes avant de se lancer.

Je pourrais écrire beaucoup de choses suite à cette vidéo, mais que rajouter après un exposé aussi documenté ?

OK, je suis un poil fainéant ; mais je vais me rattraper sur mes prochains messages, pour lesquels je n'aurais pas recours au lien externe vers une vidéo. Promis !

8 mars 2010

La France et l'Europe, par François Asselineau

François Asselineau
Je fais encore un message à base de vidéos... Mais cette fois, c'est un peu plus long ! François Asselineau nous fait une conférence de 2 heures sur la construction européenne, et ça vaut le détour.

Ce monsieur est diplômé d’HEC, et sorti vice-major de l’ENA en 1985 ; il est actuellement Inspecteur général des Finances.

Ce qu'il dit est décapant. Il démarre fort : "La France ne le sait pas, mais nous sommes en guerre avec l'Amérique", citation d'un président français (je vous laisse découvrir lequel...).



1ère partie - Leçon d'Histoire sur la guerre économique

(07:45) La corruption
Comme outil de subversion, dans la guerre économique, la corruption est un outil classique et puissant. Classique, car le plus vieux manuel de traité militaire, attribué à Sun Tzu, évoquait déjà cette technique. Puissant également, puisque l'argent est une valeur de plus en plus essentielle dans nos sociétés modernes.


Qui gouverne la France 1 de 7
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2ème partie - De Gaulle a perdu

(33:30) L'Europe a été conçue par les américains
Une bureaucratie de Shadocks, il doivent bien se marrer, les ricains... Surtout que les plans (entendez par là, le fameux traité de Lisbonne) n'ont pas été faits n'importe comment, contrairement à ce qu'on pourrait croire de prime abord... Ah on a l'air fins, maintenant qu'on est proprio dans un immeuble à la con !!


Qui gouverne la France 2 de 7
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3ème partie - la perte d'indépendance

(46:50) Chirac a violé le traité de Maastricht pour s'opposer à la guerre en Irak
Je n'ai rien à ajouter...
Ah si : quand je vois Sarkozy à l'oeuve, je regrette profondément Chirac.

(49:45) Le choc des civilisation, de Samuel Hungtington
Intéressant, pour ceux qui en ont entendu parlé, mais qui n'ont pas trop lu (comme moi :-)


Qui gouverne la France 3 de 7
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4ème partie - José Manuel Borroso

Son parcours vaut le détour. Il me fait penser à un morceau de Jacques Dutronc : "L'opportuniste" (je retourne ma veste...)


Qui gouverne la France 4 de 7
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5ème partie - Qui nous réprésente ? Des putes borgnes ?

(1:34:45) Récapitulons
Ce qui m'a peut-être fait le plus bondir, c'est la 16ème minute de la 5ème vidéo, lorsqu'il résume calmement que 11 des 27 commissaires européens sont peu ou prou des agents de la CIA.


Qui gouverne la France 5 de 7
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6ème partie - Ah là, je comprends mieux pourquoi ça fait si mal...

En France, on n'est pas très doué pour les langues ; on ne brille pas plus en économie. Raison de plus pour regarder ce passage. Après l'avoir visionné, difficile de regarder la dette publique de la même manière. La guerre économique ne laisse rien au hasard. Et le préambule revient tel un boomerang...

Le dollar, arme de guerre américaine s'il en est, vie ses derniers instants de gloire (et non des moindres).

Dis-moi à qui du dois du fric, je te dirai qui est ton Maître....


Qui gouverne la France 6 de 7
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7ème partie - le Monopoly mondial

Si t'as pas encore compris, il te reste cette vidéo... Mais attention, si tu es dépressif, passes ton chemin ! Par contre, si tu veux comprendre qui dirige le monde, et pourquoi, c'est ici.

La mondialisation, et ben y a pas besoin d'avoir fait l'ENA pour comprendre, c'est bien le fruit du "Nouvel Ordre Mondial".

Merci Monsieur François


Qui gouverne la France 7 de 7
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