24 févr. 2011

De la Révolution en Libye

Aujourd'hui, ce qui retient notre attention, c'est bien évidemment la situation en Libye. Depuis 2 mois, les pays arabo-musulmans se révoltent contre leurs dirigeants, et contre la nature dictatoriale des régimes en place dans leurs pays. Cette révolte a commencé en Tunisie, et a abouti notamment au départ du dictateur Ben Ali.

La révolte libyenne a commencé il y a plus d'un mois, le 13 janvier, et pourrait malheureusement dégénérer en guerre civile, à cause de la folie d'un homme : Kadhafi. Celui-ci refuse de quitter le pouvoir, ce qu'il a d'ailleurs réaffirmé hier dans une allocution télévisée terrifiante, disponible ici.

Pour prendre la mesure de sa folie, voici une courte citation de son discours : "La Libye dirige l'Afrique, l'Asie, et même le monde". Pourquoi pas l'univers, pendant qu'il y est !

Mais revenons au sujet, qui ne laisse pas vraiment de place à la plaisanterie. Dans le discours prononcé hier soir, il se dit prêt à mater la révolte dans son pays à coup de "boucherie" (le terme est de lui). Boucherie est effectivement le mot qui vient à l'esprit, quand on repense à l'épisode dramatique survenu avant-hier, au cours duquel des avions de l'armée libyenne ont tiré sur leurs propres citoyens.

Les bilans provisoires des affrontements entre manifestants et forces de l'ordre font état de plusieurs centaines de victimes.

Rappelons que cette boucherie est réalisée en partie avec des armes et des munitions françaises puisque, même si les avions Rafales négociés avec la Libye en 2007 et en 2010 n'ont pas encore été vendus, l'armée de l'air libyenne dispose quand même d'avions Mirages.

On ne peut que s'indigner devant le magistral retournement de veste de nos dirigeants, qui copinaient avec Kadhafi ces dernières années, et qui fustigent maintenant leur ancien copain... Kadhafi appelait Sarkozy son "frère", et l'actuel ambassadeur de France en Tunisie son "fils"...

A noter que Kadhafi a perdu le contrôle de l'Est du pays ; le ministre de l'intérieur a démissionné et a indiqué son ralliement à la révolution ; 2 pilotes d'avion de l'armée libyenne ont déserté et se sont enfuis à Malte avant-hier, après avoir refusé de tirer sur la foule. Aujourd'hui, c'est un avion militaire libyen qui s'est écrasé, après que l'équipage ait refusé de bombarder la ville de Benghazi, puis se soit ejecté. Ceci semble indiquer que l'armée ne soit pas toute entière derrière Kadhafi.

Enfin, certains des diplomates et ambassadeurs libyens actuellement en poste ont également démissionné, pour protester contre la violence de la répression.

En France aussi, notre président doit faire face à une fronde de diplomates et d'ambassadeurs, ce qui est la moindre des choses quand on constate l'amateurisme avec lequel l'Élysée de Nicolas Sarkozy gère les affaires étrangères de la France.

4 févr. 2011

De La Révolution En Tunisie

Un immense espoir est né en Tunisie, pas seulement pour les tunisiens, le Maghreb, ou le monde arabe, mais pour le monde entier.

En effet, voici une révolution citoyenne, non télé-guidée par une puissance étrangère, par une puissance religieuse ou idéologique, mais une révolution tout de même, avec des revendications fortes et précises, une alliance nationale et populaire, et une fermeté dans l'engagement que seul le désespoir peut générer.

Alors que la révolte gronde à présent en Égypte, la tension semble être redescendue d'un cran en Tunisie, suite au départ du dictateur Ben Ali. Avec un gouvernement transitoire, dirigé par M. Mohamed Ghannouchi, et assurant l'intérim, des élections sont prévues pour le 1er semestre 2011.

A première vue, il semble que la révolution Tunisienne, dite de Jasmin, ait réussi : départ du dictateur, organisation des premières élections libres dans le pays, bain de sang général évité. Cependant, l'oligarchie proche du clan Ben Ali, et notamment l'armée, ne comptent pas pour autant abandonner le pouvoir. On peut dors-et-déjà parier sur la présence aux élections de personnalités présentées comme "neuves", mais en réalité soutenues par d'anciens apparatchiks du pouvoir, et/ou par les Etats-Unis. Les premières versions du gouvernement de transition n'étaient d'ailleurs pas exempts de ces fantômes du passé.

Les revendications populaires concernent aussi bien la dictature elle-même (absence de démocratie, torture des opposants, etc.) que le rejet d'un nouvel ordre économique imposé par la mondialisation, et qui fait flamber les prix. Le futur gouvernement issu des urnes saura-t-il répondre à ces attentes ?

Alors, pour bien faire, cette révolution doit rester populaire : une alliance sacrée entre les couches les plus pauvres de la société tunisienne et la bourgeoisie locale, avec l'aide bienveillante d'une diaspora désintéressée politiquement.

Si la révolution tunisienne se cantonne à des élections, alors elle aura partiellement échoué. En effet, et nous le savons bien en occident, les élections font le jeu des partis, et les partis font le jeu des puissances d'argent. Ces partis changent les choses à la marge, sans rien modifier de l'essentiel : le statu quo dans la répartition des richesses.

Si les tunisiens veulent du changement, alors ils devraient organiser des états généraux en vue d'une constituante. Cela passe par des cahiers de doléances, ainsi que le suggère la Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives :
http://humanite.fr/25_01_2011-les-cahiers-du-tiers-immigre-463288

Mais il s'agit d'un processus plus large, comme le rappelle John Groleau de l'association Pour Une Constituante :
http://www.pouruneconstituante.fr/spip/spip.php?article357