DU BON USAGE DES CHÂTIMENTS
La trique assouplit les hommes.
LE GRAND SECRÉTAIRE. - La mauvaise herbe est la ruine des récoltes ; les scélérats sont la plaie d'une nation. Quand on extirpe la mauvaise herbe, les récoltes prospèrent ; lorsque l'on châtie les méchants, le peuple vit dans la joie. Le duc de Tcheou et Confucius n'ont pu s'abstenir de recourir aux châtiments. Il ne reste pas beaucoup de vaisselle intacte là où il y a des enfants gâtés. Que dire quand il s'agit de tout un peuple ! Les hommes deviennent arrogants quand on les traite avec amour, ils s'assouplissent sous la trique. Les peines restent les meilleurs instruments pour ramener le peuple à la raison, tout comme la bêche permet de débarrasser le bon grain de l'ivraie.
Le bon cavalier ménage sa monture.
LES SAGES. - Jadis, on conduisait le peuple par une morale sévère et on veillait à ce que les châtiments soient justes. Les châtiments sont au gouvernement ce que la cravache est à l'équitation. Un bon cavalier ne conduit pas sa monture sans cravache, mais il s'arrange pour n'avoir pas à s'en servir. Un sage souverain répand la morale par ses lois. Quand la morale est connue du peuple, il n'a plus besoin de punir. Car un prince qui impose le respect n'a pas besoin de tuer pour se faire obéir. Quand les châtiments sont fermement établis, plus personne ne songe à les braver. En abandonnant tout précepte moral, vous vous êtes privé d'un garde-fou, en ruinant la civilité et le sens moral, vous avez abattu les remparts qui vous gardaient des excès de vos sujets. Le peuple est comme pris au piège ; et vous n'avez rien trouvé de mieux que de le traquer en brandissant au-dessus de lui les foudres de la loi. Vous avez ouvert les portes d'un cachot pour tirer des flèches empoisonnées sur le prisonnier. Par cette méthode, vous ne parviendrez qu'à exterminer tous vos sujets. « Si vous découvrez un coupable, gardez-vous de vous réjouir », est-il dit dans les Entretiens. Et vous qui vous félicitez d'attraper un criminel au lieu de vous désoler que vos sujets ne connaissent pas la paix, vous nous faites penser à un guerrier muni d'une hallebarde qui se réjouirait de voir le malheureux gibier pris dans les filets et les collets. Regardez ceux qui subissent les châtiments : de nos jours, il ne semble pas qu'il faille être un grand criminel pour encourir les rigueurs de la justice ! Nous craignons fort qu'à ce train-là, il ne reste plus une seule pousse dans les champs avant qu'on n'ait séparé le bon grain de l'ivraie, et que tous les hommes soient enterrés avant d'être gouvernés.
Les origines des désordres populaires sont à rechercher dans le gouvernement ; celles des désordres du gouvernement dans la personne des dirigeants. Quand ces derniers sont probes, l'Empire est ferme sur ses bases ; c'est pourquoi le prince loue les hommes capables et a pitié des criminels. Sa bonté s'étend jusqu'aux malfaiteurs. Ses bienfaits apaisent les misères des pauvres ; il se réjouit de prodiguer ses faveurs et s'émeut d'avoir à punir.
LE GRAND SECRÉTAIRE. - La mauvaise herbe est la ruine des récoltes ; les scélérats sont la plaie d'une nation. Quand on extirpe la mauvaise herbe, les récoltes prospèrent ; lorsque l'on châtie les méchants, le peuple vit dans la joie. Le duc de Tcheou et Confucius n'ont pu s'abstenir de recourir aux châtiments. Il ne reste pas beaucoup de vaisselle intacte là où il y a des enfants gâtés. Que dire quand il s'agit de tout un peuple ! Les hommes deviennent arrogants quand on les traite avec amour, ils s'assouplissent sous la trique. Les peines restent les meilleurs instruments pour ramener le peuple à la raison, tout comme la bêche permet de débarrasser le bon grain de l'ivraie.
Le bon cavalier ménage sa monture.
LES SAGES. - Jadis, on conduisait le peuple par une morale sévère et on veillait à ce que les châtiments soient justes. Les châtiments sont au gouvernement ce que la cravache est à l'équitation. Un bon cavalier ne conduit pas sa monture sans cravache, mais il s'arrange pour n'avoir pas à s'en servir. Un sage souverain répand la morale par ses lois. Quand la morale est connue du peuple, il n'a plus besoin de punir. Car un prince qui impose le respect n'a pas besoin de tuer pour se faire obéir. Quand les châtiments sont fermement établis, plus personne ne songe à les braver. En abandonnant tout précepte moral, vous vous êtes privé d'un garde-fou, en ruinant la civilité et le sens moral, vous avez abattu les remparts qui vous gardaient des excès de vos sujets. Le peuple est comme pris au piège ; et vous n'avez rien trouvé de mieux que de le traquer en brandissant au-dessus de lui les foudres de la loi. Vous avez ouvert les portes d'un cachot pour tirer des flèches empoisonnées sur le prisonnier. Par cette méthode, vous ne parviendrez qu'à exterminer tous vos sujets. « Si vous découvrez un coupable, gardez-vous de vous réjouir », est-il dit dans les Entretiens. Et vous qui vous félicitez d'attraper un criminel au lieu de vous désoler que vos sujets ne connaissent pas la paix, vous nous faites penser à un guerrier muni d'une hallebarde qui se réjouirait de voir le malheureux gibier pris dans les filets et les collets. Regardez ceux qui subissent les châtiments : de nos jours, il ne semble pas qu'il faille être un grand criminel pour encourir les rigueurs de la justice ! Nous craignons fort qu'à ce train-là, il ne reste plus une seule pousse dans les champs avant qu'on n'ait séparé le bon grain de l'ivraie, et que tous les hommes soient enterrés avant d'être gouvernés.
Les origines des désordres populaires sont à rechercher dans le gouvernement ; celles des désordres du gouvernement dans la personne des dirigeants. Quand ces derniers sont probes, l'Empire est ferme sur ses bases ; c'est pourquoi le prince loue les hommes capables et a pitié des criminels. Sa bonté s'étend jusqu'aux malfaiteurs. Ses bienfaits apaisent les misères des pauvres ; il se réjouit de prodiguer ses faveurs et s'émeut d'avoir à punir.
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