Qui mérite d’être riche ? Tel est le titre de la dernière tribune de Jacques Attali sur son blog. Voici ma tentative de réponse du berger à la bergère, expression faisant référence au célèbre coup d’échec qui permet de mettre son adversaire échec et mat en 4 mouvements seulement.
Dans votre tribune, Jacques Attali, vous opposez les juifs et les protestants, pour qui le scandale serait la pauvreté, aux catholiques pour qui le scandale serait la richesse. Battons en brèche cette fausse évidence, en remarquant simplement que pour le haut clergé catholique, sa propre richesse lui a rarement posé problème.
Pour les chrétiens authentiques, l’enrichissement n’a jamais été le problème. Le problème a été (et est toujours) l’enrichissement des uns aux dépens des autres ; en particulier, le fait d’être riche lorsque son voisin n’a même pas de quoi vivre décemment.
Jacques Attali, vous vous offusquez d’une imposition à 75%. Bien que nous pourrions débattre sur le revenu à partir duquel ce taux d’imposition devrait s’appliquer, je remarque que le problème n’est pas le pourcentage d’imposition. En effet, que m’importe d’être taxé à 90%, si je gagne 10 milliards par an ? Il me restera 1 milliard, cela devrait amplement me suffire, non ? Que m’importe d’être taxé à 99% si je gagne 500 milliards ? Il me restera toujours 5 milliards, ce qui devrait être amplement suffisant pour faire la fête, aider mes proches, et mettre de côté pour ma descendance, non ?
Sur ce sujet, je vous recommande chaudement la (re)lecture de la parabole de l’Obole de la Veuve (Marc 12, 38-44) :
Dans son enseignement, Jésus disait : « Méfiez-vous des scribes, qui tiennent à sortir en robes solennelles et qui aiment les salutations sur les places publiques, les premiers rangs dans les synagogues, et les places d’honneur dans les dîners. Ils dévorent les biens des veuves et affectent de prier longuement : ils seront d’autant plus sévèrement condamnés. »
Jésus s’était assis dans le Temple en face de la salle du trésor, et regardait la foule déposer de l’argent dans le tronc. Beaucoup de gens riches y mettaient de grosses sommes.
Une pauvre veuve s’avança et déposa deux piécettes.
Jésus s’adressa à ses disciples : « Amen, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis dans le tronc plus que tout le monde. Car tous, ils ont pris sur leur superflu, mais elle, elle a pris sur son indigence : elle a tout donné, tout ce qu’elle avait pour vivre. »
Jacques Attali, le véritable problème aujourd’hui, c’est l’inéquitable répartition des richesses. La principale question n’est pas de savoir qui mérite d’être riche, mais qui mérite d’être pauvre. Ce n’est pas pour rien que les chrétiens véritables et les musulmans véritables se sont interdits l’usure (le prêt contre intérêt). Car aujourd’hui, il existe une forme moderne et insupportable d’esclavage : il s’agit de l’endettement. Et l’on remarquera que les juifs authentiques, c’est-à-dire ceux qui préfèrent l’étude de la Torah à l’étude du Talmud, refusent également l’insupportable, au nom de la Charité, qui est un des piliers des trois Religions du Livre.
Le problème n’est pas la disparité des richesses, cela existera toujours. Voici deux exemples concrets pour mieux illustrer mon propos : la Libye de Kadhafi, et l’Arabie des Saoud, deux pays disposant d’une manne pétrolière. Dans les deux cas, nous pouvons constater que certains en ont (beaucoup) plus profité que d’autres. Mais le système saoudien nous est 1 000 fois plus insupportable que celui de Kadhafi, car les ressortissants du royaume les plus pauvres vivent dans le dénuement le plus total, alors que les libyens les plus pauvres avaient tout ce qu’il fallait pour vivre dignement.
Et, contrairement à certaines idées reçues, cela ne les poussaient pas à l’oisiveté : voir à ce sujet l’expérience menée en Namibie avec le Revenu Minimum Garanti.
Enfin, votre tentative de nous faire peur ne fonctionne pas. Cela ne me pose aucun problème que les profiteurs et les opportunistes aillent faire leur beurre ailleurs, bien au contraire. Car il existe et il existera toujours des entrepreneurs honnêtes, qui préfèrent partager équitablement le fruit de leur travail (et de celui de leurs employés) avec leurs semblables.
Aucun riche ne s’est fait tout seul, Robespierre l’a très bien dit : « Si vous portez au trésor public une contribution plus considérable que la mienne, n’est-ce pas par la raison que la société vous a procuré de plus grands avantages pécuniaires ? »
L’enrichissement de la société toute entière n’est-elle pas 1 000 fois préférable à celui de quelques uns ?
Enfin, puisque la musique adoucit les mœurs, je vous propose un morceau de Johnny Osbourne que j’apprécie beaucoup. Ce chanteur jamaïcain, qui a commencé sa carrière à la fin des années 1960, était pour la première fois en France au festival de Bagnols sur Cèze, présenté par mon ami Little Francky. Voici donc le morceau Words of the Ghetto :
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